Texte écrit pour la rencontre chez Ann Loubert du groupe La Forge - 16 octobre 2024
Ces restes négligeables
Sur la nappe-monde, quels sont les restes du repas de Walmart, State Grid, Shell, Wolkswagen et Axa ?
Quelles miettes d’hommes, d’arbres, de terres limoneuses, de rivières, de paroles, d’utérus et de rires d’enfants ?
Combien de silences de chiffres, de saisons avortées, de rapports en papier glacé, de serviettes à billets, de tintements de glaçons, de fines réparties au bout des fume-cigarettes, de grillages et de cadavres dans le désert, de VIP in the place to be ?
Combien c’est compter. Compter c’est combien. C’est pas combien je t’aime. La civilisation du like compte, l’algorithme compte. On compte le Produit National Brut, on compte le nombre d’artistes, d‘écrivains, de galeries, d’événements culturels pour la foire, la fête, le salon, le tourisme, le Produit Intérieur Brut, la Balance des paiements, les importations. On compte combien. On compte pour qui. On compte pas pourquoi. On compte pas pour n’importe quoi. On compte pas pour ou contre, on compte un point c’est tout. Et ça tombe pas juste. Il reste des quantités. Négligeables. Des restes. Des déchets d’additions et de soustractions, des pertes de divisions, des miettes, des dettes, des broutilles, des fuites, des marées noires, des tâches d’huile, des sans-papiers, des déchets, des os, des bidonvilles, des erreurs, des disparus, des errements, des inconnues , des excréments, des pas perdus. Il reste ce qui ne compte pas. Ces restes négligeables, c’est pour les fourmis, les rats, les clochardes et les générations futures. Négligeable : Du latin negligere (« ne pas faire attention à », « ne pas s’occuper de », « dédaigner », « omettre ») - synonyme de petites quantités : Dans les calculs d’approximation, on néglige les quantités extrêmement petites.
Matt Mahlen
